L’ours, disperseur bienfaiteur des graines

L’ours, disperseur bienfaiteur des graines

Photo Olivier Paris
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Un ours en Finlande. Photo Olivier Paris

Extraits de l’étude « The role of the brown bear Ursus arctos as a legitimate megafaunal seed disperser« , janvier 2021 (Alberto García‑Rodríguez, Jörg Albrecht , Sylwia Szczutkowska , Alfredo Valido , Nina Farwig & Nuria Selva). 

Le rôle de l’ours brun en tant que facteur de dispersion des graines

Les grands frugivores semblent avoir un rôle particulièrement important dans la connexion des populations de plantes en augmentant le flux d’échange de gènes par la dispersion des graines. Ces grands frugivores ont un rendement de dispersion des plantes variable qui dépend de deux facteurs : la contribution qualitative et la contribution quantitative à la dispersion des graines. Le paramètre quantitatif est lié au nombre de graines dispersées, le paramètre qualitatif est lié à la probabilité qu’une graine dispersée germera, survivra et deviendra une plante adulte, ce qui dépend de l’effet du passage dans le système digestif et du dépôt dans un micro-habitat favorable. Les vrais dispersants sont les animaux qui combinent à la fois la quantité et la qualité de la dispersion. Alors que de nombreuses études de dispersion ciblaient les oiseaux et les mammifères moyens dans les zones tropicales, peu d’études concernaient l’effet des grands frugivores en milieu tempéré. Leur déclin au cours des derniers siècles a pu dégrader la dispersion de plantes avec un effet négatif sur la régénération, la structure de population, la diversité génétique et leur trajectoire évolutive. C’est la raison de cette étude.

Notre objectif principal était d’évaluer le rôle de l’ours brun comme facteur de dispersion autant du point de vue de l’efficacité quantitative que qualitative. Nous avons identifié les fruits charnus mangés par l’ours à travers son entière aire de répartition, évalué la part de fruits consommé par l’ours et déterminé les effets de cette consommation sur la proportion et la vitesse de germination des fruits concernés.

Vaccinium myrtillus

Résultats

1. Efficacité quantitative

Les pourcentages de fruits charnus dans le régime de l’ours sont fortement corrélés à leur taux de présence sur le terrain. 101 espèces de fruits appartenant à 42 genres et à 24 familles sont mangées par l’ours. Du point de vue philogénétique, les Rosacées et les Ericacées sont les familles les plus fréquentes. Les genres les plus fréquents sont Rubus, Vaccinium, Prunus et Empetrum. L’espèce qui arrive en tête (21% des zones) est Empetrum nigrum (la camarine noire, un arbrisseau persistant de la famille des Ericacées, présente dans les zones tempérées et froides de l’hémisphère boréal). Viennent ensuite Vaccinium myrtillus (20%), la myrtille, puis Vaccinium vitis-idaea (18%), l’airelle rouge. L’étude a montré que les fruits charnus constituent une moyenne de 26% en volume du régime de l’ours sur l’ensemble des zones étudiées. Pour la myrtille par exemple, on a trouvé jusqu’à 2000 graines par crotte dont 99% intactes ce qui révèle l’importance de l’efficacité de dispersion quantitative de l’ours.

2. Efficacité qualitative

Les graines récupérées dans des crottes d’ours ont été plantées et leur germination a été comparée à celle de graines non ingérées par l’ours.  Les graines ingérées par l’ours avaient une meilleure probabilité de germination (66%) par rapport à celles épulpées manuellement (56%), ces dernières ayant de meilleures probabilités que celles plantées avec leur chair (26%) ce qui prouve une importante efficacité qualitative.

Conclusion

L’ours s’avère donc être un excellent disperseur de graines et avoir un impact substantiel sur la régénération des plantes dans tous les biomes où il est présent. L’ours doit être reconnu comme l’un des rares grand dispersant de graines dans les zones tempérées et boréales.

Traduction Eugène Reinberger pour FERUS