Massif du Jura : lettre aux élus en faveur de la coexistence élevage / grands prédateurs

Massif du Jura : lettre aux élus en faveur de la coexistence élevage / grands prédateurs

Photo © Roland Clerc
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Il y a quelques semaines, la FDSEA et les Jeunes Agriculteurs adressaient un courrier aux maires et aux élus du Doubs et du Jura afin de leur signifier leur opposition aux loups. Nos associations (FERUS, FNE Bourgogne-Franche-Comté et Vigie Jura) on fait de même en retour pour prôner la coexistence entre l’élevage et les grands prédateurs.

Objet : coexistence de l’élevage et des grands prédateurs.

Mesdames, Messieurs les Maires,
Mesdames, Messieurs les Conseillers municipaux,

Vous avez toutes et tous reçu un courrier de la FDSEA et des Jeunes Agriculteurs au sujet du loup. Pour y faire suite, il nous semble important de rétablir la vérité en ce qui concerne la présence du loup sur notre territoire.
Avant toute autre chose, il faut rappeler que :

  • l’explosion du nombre de prédations n’a pas eu lieu : le dernier graphique de ladite lettre le montre clairement, ni en France, ni dans nos départements.
  • les méthodes d’évaluations de la population lupine est la même depuis plusieurs décennies et n’a jamais été contestée par les éleveurs ; alors pourquoi soudainement maintenant ?
  • du point de vue démographique : NON, le seuil de viabilité du loup en France n’est pas atteint. En avançant 500 loups comme chiffre suffisant pour la santé de l’espèce les deux signataires déforment la vérité. Le Conseil National de Protection de la Nature a rappelé à l’État dans son avis du 23 mai dernier que le seuil de viabilité démographique et écologique de l’espèce, permettant sa viabilité à long terme, est estimé à 500 individus reproducteurs (et non 500 individus comme souvent avancé). Ce seuil n’étant pas atteint à ce jour, l’espèce ne peut pas être considérée comme étant dans état de conservation favorable.

Mais au-delà de ces considérations scientifiques, la volonté affichée d’éradication des loups sur notre territoire pose la question de notre manière de considérer la nature qui nous entoure. A l’heure où partout la vie sauvage est malmenée et doit être protégée, nous n’aurions comme réponse que le plomb et les fusils lorsque nous sommes confrontés au retour du loup ?
Depuis près de 20 ans, des tirs de loups sont largement autorisés par l’Etat. Ni l’Etat, ni les syndicats agricoles, ni aucune étude scientifique n’a démontré que ces tirs avaient fait diminuer le nombre de prédations !

Nous sommes pourtant d’accord avec la FDSEA et les JA sur le point suivant : il faut trouver de réelles solutions pour répondre concrètement à la détresse des éleveurs.

En effet, les attaques de loups sur les bovins remettent en question les habitudes prises pendant les 70 ans au cours desquelles le loup, suite à son éradication complète et systématique, n’était plus présent sur notre territoire. Nous, habitants et élus de Bourgogne Franche-Comté, devons désormais collectivement nous emparer de ce sujet afin d’apporter
notre soutien aux éleveurs face à ce challenge.

Il devient urgent de cesser les discours démagogiques et simplistes et de travailler sur des solutions qui, elles, font leurs preuves.
Les moyens de protection*, qui sont multiples et à perfectionner au cas par cas, sont la seule voie qui permettrait à l’élevage de coexister avec le sauvage.

L’adaptation de l’élevage et la mise en place de moyens de protection prenant du temps, les associations de protection de la nature se sont mobilisées afin de proposer des solutions d’urgence, en attendant que des solutions pérennes se mettent en place. En 2023, nous
avons répondu présents en formant par exemple plus d’une centaine d’habitants des départements du Jura et du Doubs
pour surveiller bénévolement, la nuit, les troupeaux des éleveurs demandeurs.
L’élevage, comme nos territoires, est confronté à la difficile question de la transition écologique. Comme nos territoires, il évoluera. Œuvrons ensemble à ce que l’arrivée du loup constitue une belle opportunité pour poser les bonnes questions et y répondre collectivement sous la houlette des élus.

Nous resterons sur le terrain avec de nombreux partenaires pour trouver les meilleures solutions à long terme et dépasser cette vision réductrice d’un monde de l’élevage en guerre contre le monde sauvage.

Nous sommes à votre disposition si vous voulez en savoir plus ou échanger et vous remercions de l’attention que vous porterez à ce courrier.

Avec notre respectueuse considération,

*Les moyens de protection sont très divers : clôture, chien, parc de nuit, gardiennage humain, répulsif olfactif ou visuel, tir non-létal d’effarouchement, collier à ultrasons, etc…