Ours : FERUS répond à Bonrepaux

Ours : FERUS répond à Bonrepaux

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M le Député Augustin BONREPAUX
Rapporteur
Assemblée Nationale
126 Rue de l’Université
75355 PARIS CEDEX 07 SP

Le 31 août 2006

Monsieur le Député,

Par courrier du 17 juillet dernier, vous avez souhaité connaître le montant des subventions qui ont été versées à l’association FERUS -avec un seul « r »(sauvage en latin)- dans le cadre de l’information que vous menez sur le coût budgétaire de la réintroduction de l’ours dans les Pyrénées.

Notre association tient à souligner qu’il ne s’agit pas d’un programme d’introduction ou de réintroduction, mais de renforcement d’une population en grand danger d’extinction locale.

1° – Rappel historique et juridique

La nuance n’est pas que de détail. Lorsqu’une espèce a disparu, on peut envisager sa réintroduction mais il faut peser le pour et le contre, y compris et surtout s’assurer l’acceptation sociale du projet.

La France a connu de telles réintroductions, souvent à l’initiative des chasseurs qui n’ont en général pas demandé l’avis des populations locales (cerfs, chevreuils, chamois, sangliers ont ainsi repeuplé des zones dont ils avaient disparu, alors que le mouflon a lui carrément été introduit).

Des espèces en danger comme le castor, le bouquetin, certains rapaces (gypaète, vautours moine et fauve) ont été réintroduites avec succès après de longues études préalables.

L’ours « ursus arctos », lui, n’a jamais disparu des Pyrénées.

Certes sa population a été réduite à sa plus simple expression au fur et à mesure que les braconniers éliminaient ses derniers représentants. Au pire moment, avant le premier renforcement de 1996, il restait moins de cinq ours sur l’ensemble de la chaîne.

L’apport d’individus provenant d’une population extérieure de même espèce est un des moyens fortement recommandés par les diverses instances internationales compétentes en matière de conservation de la biodiversité pour atteindre un but que les Etats se sont assignés : la protection de leur flore et de leur faune sauvages.

Le parlement français, en votant à plusieurs reprises des textes qui rendent cette protection obligatoire, a de facto approuvé les moyens qui font que la conservation des espèces ne reste pas lettre morte.

2° – Clarification financière des aides publiques – un préalable indispensable

Dans son exposé des motifs, le député Lassalle évoque « les politiques en faveur de l’ours depuis quarante ans ».

C’est bien ces politiques qu’il faut apprécier, depuis les premières indemnisations des dégâts d’ours par les chasseurs, puis par le parc national des Pyrénées occidentales, jusqu’aux récents renforcements de populations.

Des moyens financiers ont été attribués à de nombreux organismes dont la vocation était notamment la sauvegarde de l’ours. Celui qui a reçu les aides les plus importantes en volume est sans conteste l’Institution Patrimoniale du Haut Béarn (IPHB).

FERUS souhaite que la totalité des crédits publics qui ont été affectés à la conservation de l’ours, directement ou indirectement, soit prise en compte par la commission.

Les sommes consacrées aux indemnisations des dégâts d’ours ou aux apports d’individus venus de Slovénie sont très inférieures aux sommes qui ont été dépensées pour améliorer la vie des bergers et les conditions matérielles des éleveurs au nom de la présence de l’ours (beaucoup de ces crédits provenaient d’ailleurs de lignes budgétaires « faune sauvage ».

Les parlementaires en adoptant des lois de finances successives qui attribuaient de maigres crédits à la conservation de la nature dans ce pays ne savaient peut être pas qu’une part non négligeable de ces derniers servaient en fait à soutenir une activité économique).

FERUS ne peut que se réjouir que l’ours ait ainsi servi de fondement à des actions en faveur de l’élevage mais il aimerait apprendre, si l’on dresse un bilan de la pertinence des financements publics, en quoi ces crédits ont amélioré la situation de l’ours dans les Pyrénées.

Le Béarn, qui a longtemps été pionnier en la matière, n’a pas pu empêcher la mort, du fait de chasseurs locaux pleinement conscients de leurs actes, des derniers ours autochtones. La situation y a empiré depuis que l’Etat s’est dessaisi de ses responsabilités au profit de l’IPHB voilà dix ans.

3° – Clarification sur la déontologie de l’information

Enfin FERUS aimerait être rassuré sur l’impartialité de la commission qui, même si elle élargit comme nous le souhaitons le champ de ses investigations, paraît avoir jugé le procès avant de l’avoir instruit.

Celui qui l’a proposée écrit dans l’exposé des motifs qu’un ours en liberté représente un danger potentiel pour les populations (humaines). Cela laisse penser que le seul ours qui trouve grâce à ses yeux est un ours disparu.

Cela semble au passage contradictoire avec les buts de l’IPHB qu’il a créée. Il écrit aussi que l’arrivée d’ours a été ressenti comme un viol de leur territoire par « les populations pyrénéennes » mais rappelle que lui même avait prévu d’introduire deux femelles, qui n’auraient sûrement pas davantage trouvé grâce aux yeux des bergers béarnais.

On ne peut s’empêcher de penser que c’est le dépit de n’avoir pas été l’acteur principal du sauvetage de l’ours qui l’anime, comme on ne peut que mettre en doute ses affirmations sur l’opinion des populations pyrénéennes qui sont pour le moins partagées et dont une majorité est très favorable au maintien des ours dans la montagne.

Vous même, Monsieur le Député, qui qualifiez les ours de « fauves slovènes » dans vos écrits publics, n’avez jamais fait mystère de votre profonde hostilité envers ce programme de sauvetage de la population d’ours des Pyrénées. C’est parfaitement votre droit (même si c’est quelque peu contradictoire avec les lois de protection de la biodiversité qui ne font pas d’exception au détriment d’espèces qui déplairaient à tel ou tel intérêt économique).

Cela ne peut toutefois que nous inquiéter et nous faire douter de votre volonté d’établir un bilan exhaustif et impartial de tous les efforts financiers qui ont été consentis en faveur de l’ours depuis sa protection légale.

Nous aimerions être rassurés sur ces points avant d’apporter notre modeste participation aux travaux de la commission.

Je vous prie de croire, Monsieur le Député, à l’expression de mes meilleurs sentiments.

Le président – J F Darmstaedter