Loup en Isère : la position commune WWF/FERUS

Loup en Isère : la position commune WWF/FERUS

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RESTONS CALMES ET RELATIVISONS !

Carnivores opportunistes et puissants, les loups peuvent s’attaquer à toutes les proies vivantes de bonne taille dans notre pays – hormis l’homme, qui ne représente pas une proie potentielle. La peur qu’ils inspirent depuis des siècles est tout à fait réciproque, et ce sont eux qui en ont payé le plus lourd tribut, l’homme s’étant approprié l’essentiel de leur habitat et de leurs proies.

Le loup a vocation à coloniser de nouveaux territoires : au fil de sa progression, il s’attaquera forcément à d’autres proies que les ovins – et en dehors des seules zones d’alpages.
Reconnaissant que le retour du loup en France constitue un enrichissement de notre patrimoine naturel, l’Etat s’est engagé à concilier le développement de cette espèce avec le maintien des activités pastorales à travers la mise en place d’un plan d’actions (Plan Loup) cosigné par les ministères de l’Ecologie et de l’Agriculture. A cette fin, des moyens de gestion et de réduction des conflits entre le loup et le monde de l’élevage doivent être mis en œuvre. Le plan Loup prévoit ces mesures sur les zones de présence permanente de l’espèce, il s’agira donc de les étendre progressivement aux nouveaux territoires sur lesquels elle s’installera.
Ces moyens comprennent l’indemnisation des dégâts, la mise en place de mesures de protection des troupeaux (gardiennage, chiens de protection, clôtures électriques), et la possibilité d’abattages en cas d’échec de ces moyens de protection, sous réserve d’un état de conservation favorable de la population de loups.

Les attaques de génisses survenue dans la nuit du 10 au 11 mai sur la commune de St Geoire en Valdaine et dans les nuits du 3 au 4 mai et du 18 au 19 mai sur la commune de Bilieu, à plus de 50 km d’une zone de présence permanente de loups, correspondent à un cas de figure particulier : ce type d’élevages, sans gardiennage possible, sont très vulnérables et des solutions nouvelles doivent être identifiées, comme le préconise le plan Loup. Parmi celles-ci, les tirs d’effarouchement peuvent être envisagés – même si leur efficacité n’est pas garantie -, mais il ne peut en aucun cas s’agir de la mise en place de zones d’exclusion (ce qui est désormais clairement exclu par l’Etat), ni de captures, ni d’abattages. La décision prise hier par le gouvernement d’autoriser l’usage de tirs anesthésiants, afin de capturer le loup pour le placer dans un parc animalier, revient à exclure celui-ci de la nature. Cela ne fait aucune différence en termes d’objectifs de conservation avec son abattage pur et simple, tel que le gouvernement l’envisage également en cas d‘échec de la capture. Le recours à cette solution non seulement contredirait le propre objectif du gouvernement de développement de l’espèce, mais serait aussi illégal, les moyens de protection adéquats n’ayant logiquement pas été mis en place sur une zone où la présence du prédateur n’était pas encore avérée. Enfin, les mesures dites de « rabattement » autorisées par le Préfet de l’Isère seront aussi inefficaces qu’absurdes : au mieux, elles pousseront l’animal à attaquer inévitablement des proies dans d’autres secteurs.

En revanche, dans la mesure où la responsabilité du loup est attestée comme c’est le cas sur St Geoire en Valdaine, et si elle est confirmée pour Bilieu, il est indispensable que les propriétaires des animaux attaqués soient indemnisés rapidement, sans devoir passer par des démarches administratives compliquées. Concernant les moyens de protection, plusieurs pistes peuvent être envisagées : la mise en place de clôtures mobiles, qui serviraient autant à éviter la prédation du loup que celle de chiens divagants, de renards, de fouines ou d’autres carnivores, ou le retrait des animaux de certaines pâtures pendant la nuit – à condition qu’il soit assorti d’un système d’aide pour alléger la charge de travail supplémentaire des propriétaires d’animaux domestiques.

Comme l’Homme, le loup mange de la viande. Pour assurer son retour dans notre pays, il faut tolérer certains dégâts et mettre en place toutes les mesures possibles favorisant son acceptation.

D’autres espèces, carnivores comme le loup, ne suscitent pas tant d’animosité dès lors qu’elles sont chez les autres. Gardons-nous donc de donner des leçons aux pays souvent moins riches, à qui l’on reproche de ne pas en faire assez pour protéger leurs prédateurs (jaguars en Amérique du Sud, lions en Afrique, tigres en Asie…), et relativisons l’impact du loup chez nous : 6 875 animaux domestiques de Gilly-sur-Isère ont été abattus parce qu’ils étaient contaminés par les fumées de son incinérateur ; la maladie de la vache folle a entraîné chez nous l’abattage de plus de 36 000 bovins ; enfin, en moyenne 700 000 ovins et caprins de réforme (sur un cheptel de 12 millions) partent à l’équarrissage chaque année en France avec un paiement à chaque étape (éleveurs, usines de transformation en farine, incinérateurs)…

Que représente le coût du loup dans cet océan de gaspillage ?

Note aux rédactions

Le WWF-France et FERUS travaillent ensemble sur le loup depuis 1998. Pastoraloup, le programme d’écovolontariat pour la surveillance des troupeaux, est l’une des illustrations de ce partenariat.