J’estive avec les ours… et j’aime ça !

J’estive avec les ours… et j’aime ça !

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Sylvie et ses 4 chiens en estive.

Article paru dans la Gazette des grands prédateurs n°44 (mai 2012)

Août 2011, enfin nous partons demain pour les Sestagnous. Une bonne semaine de retard ! Tout ça à cause du temps. Difficile de partir avec le troupeau de vaches pour ce quartier de haute montagne avec les pluies de ce début d’été. Toute la montagne est trempée, dégouline de tous les côtés, les chemins sont devenus instables par endroits, le brouillard est de la partie, un vrai bonheur !

Un mot pour nous présenter. Nous sommes éleveurs de bovins et d’ovins, mon compagnon et moi, dans les Pyrénées centrales, à Melles, le village où les premiers ours ont été introduits en 1996. Depuis, d’autres sont arrivés, et notamment Hvala, venue de Slovénie en 2006. Elle a élu domicile sur le territoire de la commune de Melles, a mis au monde des oursonnes, deux fois des jumelles, qui sont restées dans le secteur en se partageant le territoire.

Montagne sauvage, Pays de l’ours

Les Pyrénées centrales sont restées un massif assez sauvage, avec ses montagnes escarpées, ses forêts denses et un réseau de routes et de pistes forestières globalement peu développées. Jusqu’à quand ? Nous estivons sur les montagnes de Melles depuis 2005. Nous avions alors un troupeau de brebis laitières. En 2006, Hvala venait nous rendre visite presque tous les soirs. Elle s’était habituée en ce début d’été à venir croquer quelques brebis du troupeau de Tarasconnaises qui estivait sur le massif des Sédères, à côté de notre pacage. Mais Hvala a trouvé en face d’elle nos trois chiens Montagne des Pyrénées, et elle est répartie bredouille à chaque fois. Nous faisions alors du fromage. À partir de l’année 2008, nous avons changé de production, nous avons réintroduit … des vaches à Melles. Nous produisons maintenant du veau rosé*, du bœuf et de l’agneau, dont nous vendons la viande en colis, directement au consommateur.

Depuis que nous avons un troupeau de vaches, tous les étés, nous estivons, dans le cadre du Groupement Pastoral bovin que nous avons créé, avec notre troupeau et d’autres venant de la plaine. C’est donc la troisième année que nous estivons ainsi, et que nous allons monter aux Sestagnous, ce quartier abandonné depuis quasiment 30 ans par les troupeaux, ce quartier isolé et envahi de rhododendrons, de bruyère et de myrtilliers. Mais c’est un quartier où il y a de l’eau et où les vaches sont tranquilles. Enfin presque. Parce que c’est le quartier des ours. Les ours sont comme les vaches. Ils aiment bien être tranquilles ! Et là, pas de route, pas de piste, un chemin visible que maintenant après deux années de fréquentation par le troupeau. Parce que la première année, pour y monter, aux Sédères, il a fallu de la persévérance, une bonne condition physique et de bons chiens de conduite.

Pour y aller, il faut commencer par redescendre du Jarus, aller à la ferme, y passer la nuit et partir de bonne heure le lendemain matin. On commence la transhumance par la route. Une petite route de montagne, une descente de 3 kilomètres vers le village et la montée vers Labatch, environ 8 kilomètres. Ce n’est pas une partie de plaisir, ni pour les vaches, à qui nous ne laissons pas le temps de manger la bonne herbe du bord de route, ni pour nos chiens, ni pour nous. Le bitume est dur, vite chaud, les voitures veulent passer et celles qui sont derrière nous ne le pourront pas jusqu’à la fin de la route, les vaches veulent explorer les pâtures qui jouxtent la route, les sentiers, les jardins, les chiens courent, les ramènent, les poussent. Voilà donc ce qui nous attend demain. Nous ne serons pas seuls, Philippe et moi. Thomas sera là. Il a des vaches sur l’estive. Jean-Guy sera là aussi. Il a gardé les vaches quand il était petit, il y en avait à Melles autrefois, et depuis que nous estivons avec des bovins, il accompagne la transhumance tous les ans. Cela lui rappelle ses jeunes années ! Et il y aura les chiens. C’est moi qui garde l’estive durant tout l’été, avec mes chiens, deux borders Collie, Tom et Biz, et deux bergers allemands, Ugo et Dily. Le travail délicat, le retournement des vaches dans des zones rocheuses, dans les pentes dangereuses, c’est du ressort de Tom et Biz. Tom est un chien rapide, qui a le sens du troupeau, toujours attentif, qui réagit avant moi. Biz est une chienne puissante, qui ne recule pas quand une vache la charge, qui va chercher la tête, lui plante les dents si nécessaire, pour que la vache lui obéisse. Le travail de conduite sur route et sur chemin, c’est la spécialité d’Ugo. Je n’ai rien besoin de dire, il regarde, remet les vaches dans le bon chemin, aboie quand il y en a qui traînent pour les faire rejoindre le troupeau. Et Dily apprend encore. Elle est jeune. Elle est puissante, sans peur, ne recule jamais. Une « meute » efficace. Des compagnons irremplaçables.

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