Cannelle : pourquoi l’Etat n’a pas fait appel ?

Cannelle : pourquoi l’Etat n’a pas fait appel ?

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Le 21 avril dernier, le chasseur René Marquèze qui avait tué l’ourse Cannelle en 2004 a été relaxé. Le parquet général n’ayant pas fait appel de la décision, FERUS demande solennellement au ministre d’Etat chargé de l’écologie et à la Garde des Sceaux d’expliquer pourquoi l’Etat n’a pas fait en sorte que soit interjeté appel de cette décision.

Courrier à NKM, 25 juillet 2008

Madame Nathalie KOSCIUSKO-MORIZET
Secrétaire d’Etat à l’Ecologie

Le 25 juillet 2008

Madame la Ministre,

FERUS est scandalisé d’apprendre que le parquet général n’a pas fait appel de la décision relaxant M.Marquèze, le chasseur qui a tué l’ourse Cannelle, dernière ourse de souche pyrénéenne. FERUS demande solennellement au ministre d’Etat chargé de l’écologie et à la Garde des Sceaux d’expliquer pourquoi l’Etat n’a pas fait en sorte que soit interjeté appel de cette décision.

FERUS estime qu’un procès en appel aurait été l’occasion pour la justice de renforcer la protection de l’environnement en affirmant que si des actes qui le mettent à mal sont clairement prohibés par la loi, qu’il s’agisse de pollutions, de travaux ou d’atteintes directes aux espèces, ceux qui les commettent sont condamnés même si, par ailleurs, les pouvoirs publics ont partiellement failli à leur mission. Soutenir le contraire aboutit à déresponsabiliser les individus, qui sauront toujours mettre en avant les imperfections des politiques publiques.

Le raisonnement tenu par le procureur de la République lors du procès en première instance du chasseur qui a tué Cannelle, puis repris par le juge lors du rendu de décision, ne nous satisfait pas.

Oui, l’Etat chargé de la protection des espèces sauvages menacées aurait du instituer des mesures concrètes de protection des zones où les ourses ont l’habitude d’élever leurs jeunes et imposer des restrictions aux battues. Oui, les engagements pris unilatéralement par les chasseurs de ne pas aller dans les secteurs où des ours leur auraient été signalés étaient insuffisants. Mais ce n’est pas une raison pour exonérer les chasseurs de leur responsabilité : on trouve des espèces protégées partout en France, personne n’est chargé de signaler la présence des représentants de ces espèces aux chasseurs, et leurs habitats ne font pas, dans leur grande majorité, l’objet d’interdictions par rapport aux actes de chasse.

Si l’on considère plus précisément l’ours, la vingtaine d’individus actuellement présents dans les Pyrénées peut être rencontrée au hasard de déplacements qui, à l’exception des trois ours équipés d’émetteurs, sont mal connus. Ces ours exploitent des dizaines de milliers d’hectares et parcourent parfois de très grande distances. Tous les chasseurs, à titre individuel et au niveau des équipes, doivent prendre leurs dispositions pour ne pas risquer de déranger ou de tuer ces ours.

Lors du procès, l’Etat a été désigné responsable de la situation alors que le chasseur avait lui aussi une part de responsabilité.

Plus personne n’est donc responsable :

  • l’Etat est désigné responsable mais il ne change pas sa politique ;
  • Le chasseur est jugé irresponsable ;
  • l’Etat ne fait pas appel.

Aujourd’hui le message implicite adressé par le parquet aux chasseurs est involontairement une information permettant le permis de tuer en prétextant l’état de nécessité dès lors que l’Etat n’a pas expressément interdit les actes de chasse.

Cette affaire a été jugée par une seule personne et non trois, ce qui aurait du motiver, légitimement et de surcroît, l’Etat à faire appel de cette décision.

Que faut-il donc faire maintenant ? Déclasser l’ours de son statut d’espèce protégée ?

Dans l’attente d’une explication concernant cette situation scandaleuse, nous vous prions d’agréer, Madame la Ministre, l’expression de notre parfaite considération.

Le président, J F DARMSTAEDTER

La trésorière – coordonnatrice ours, Sabine MATRAIRE

Photo : l’ourse Cannelle